Tous les deux ans depuis 2013, la Suède, la Finlande ou la Norvège organise à tour de rôle l'exercice international Arctic Challenge Exercise (ACE), dans le cadre de la structure tripartite Nordic Defence Cooperation (NORDEFCO), qui permet de faciliter la mise en place des entraînements militaires et de procédures communes (interopérabilité, communication, …) entre ces trois pays du nord de l'Europe.
Cet exercice de grande ampleur réunit également de nombreuses forces aériennes occidentales et dont une majeure partie fait partie de l'OTAN, outre la Suède et la Finlande. Cela permet à ces trois pays du nord de l'Europe et à tous les participants invités d'améliorer leur interopérabilité, de développer de nouvelles tactiques et d'innover dans la conduite de la guerre aérienne, de mener des vastes opérations avec plusieurs dizaines d'aéronefs dans les airs, etc…
Cette année, ACE 2019 est organisé du 22 mai au 4 juin 2019 par les forces armées suédoises et plus précisément par la Force aérienne suédoise (Svenska flygvapnet). Cette dernière est toutefois associée et soutenue par la Force aérienne royale norvégienne (Luftforsvaret) et la Force aérienne finlandaise (Suomen ilmavoimat).
Ces trois nations se partagent l'accueil des participants à l'exercice et mettent en place ensemble une zone d'entraînement commune qui se situe à cheval sur l'espace aérien des trois pays, dans le nord. Cette année, neuf nations (plus l'OTAN) sont présentes à ACE 2019, ce qui représente plus de 4 000 militaires et pas moins de 140 avions de combat (avions de chasse, de transport, d'alerte avancée, de ravitaillement de vol, etc…) et des hélicoptères spécialisés dans les missions CSAR (Recherche et sauvetage au combat).
L'ensemble de ces aéronefs est réparti entre la base aérienne de Luleå-Kallax en Suède, celle de Rovaniemi en Finlande et celles de Bodø et Ørland en Norvège :
• Luleå-Kallax accueille un avion de transport C-130J Super Hercules, 5 Eurofighter Typhoon et 1 avion de guerre électronique DA-20 de la Royal Air Force, deux Learjet et deux A-4 Skyhawk de compagnies privées allemandes qui viennent compléter le dispositif, 18 JAS-39C/D Gripen et 2 hélicoptères NH-90TTH de la Force aérienne suédoise ainsi que 12 F-16CJ du 157th Fighter Squadron de l'US National Guard.
• Rovaniemi est occupée par 8 F-16AM/BM de la Force aérienne royale danoise, 12 F/A-18C/D Hornet, 4 hélicoptères NH-90TTH, 1 avion de transport Casa C-295M et 1 Pilatus PC-12NG de la Force aérienne finlandaise et par 8 F/A-18 Hornet de l'US Marine Corps.
• Bodø reçoit 8 JAS-39C/D Gripen de la Force aérienne suédoise, 10 F-15C Eagle du 131st Fighter Squadron de l'US Air National Guard, 10 Eurofighter Typhoon et 1 ravitailleur A310 MRTT de la Luftwaffe, 10 F-16AM/BM et 1 avion de guerre électronique DA-20 de la Force aérienne royale norvégienne et tout le dispositif français.
En effet, l'armée de l'Air déploie sur la base aérienne de Bodø quatre Mirage 2000-5F du Groupe de Chasse 1/2 « Cigognes », des Rafale Air de l'Escadron de chasse 1/4 « Gascogne » et de l'Escadron de chasse 2/4 « La Fayette » de la 4ème Escadre de chasse, des Rafale du Régiment de Chasse 2/30 « Normandie Niémen » de la 30ème Escadre et un E-3F SDCA d’Avord. L'ensemble de ce détachement est mis en oeuvre par environ 300 aviateurs au sol (mécaniciens, armuriers, spécialistes avionique ou cellule, commandos, etc…).
• Enfin, Ørland voit le décollage et l'atterrissage de 2 E-3A Sentry AWACS de l'OTAN, 2 E-3D (Sentry AEW.1) de la Royal Air Force et de 3 KC-135 Stratotanker du 141st et du 174th Air Refueling Squadron de l'US Air National Guard.
A noter qu'un avion de ravitaillement en vol A330 MRTT (Voyager) de la Royal Air Force et qu'un KDC-10 de la Force aérienne royale néerlandaise opèrent depuis leur base aérienne respective, et que des F-35A Lightning II norvégiens sont également intégrés dans les missions.
© Groupe de chasse 1/2 « Cigognes » - Les 2000-5F au travail pendant ACE 2019.
© GC 1/2 « Cigognes » - Légende donnée par le Groupe depuis sa page Facebook : « Nos pilotes participent quotidiennement à deux tours lors de COMAO (Combined Air Operation) complexes et très dynamiques. La preuve en image avec cette formation 100 % experts DA composée de quatre 2000-5 (le 4e prend la photo) et 4 F-15C du 131st Fighter Squadron du Massachussets Air National Guard (Barnes ANGB). Lors de cette mission, nos -5 étaient les Red Air et les F-15 faisaient partie de la Defensive Counter Air d'en face. Nos ROE, dans ce cadre, nous interdisaient les engagements BVR, juste pour corser les choses ».
Au cours de ces deux semaines d'exercice, les participants vont effectuer deux sorties par jour, une dans la matinée et la seconde dans la journée. Il s'agit généralement de mission de type « Entry Force » (ou d'entrée en premier). Pour les participants, le but consiste à rejoindre une zone d'opérations, d'y acquérir la supériorité aérienne, d'effectuer les objectifs (frappes au sol, reconnaissance, etc…) et de retourner sur la base de départ. Toutefois, en fonction des besoins en matière d'entraînement et de formation des forces aériennes présentes, certains équipages peuvent s'entraîner au maintien de compétences spécifiques (Mission commander, ravitaillement en vol, défense aérienne, etc…).
L'ensemble de ces opérations aériennes (COMAO : Composite air operations) rassemble à chaque fois entre 40 et 50 appareils différents (chasse, transport, guet aérien…). Le dispositif est globalement composé en deux forces avec la « Blue Force » et la « Red Force », qui joue les « ennemis ». De retour sur leur base aérienne, les aviateurs « débriefient » afin d'analyser leur mission et de voir si les objectifs ont été atteints.
La première mission qui est effectuée le matin se déroule dans l'espace aérien du pays d'où décollent les appareils. Toutefois, lors de la seconde vague l'après-midi, l'ensemble des participants traversent les frontières des trois pays et combattent sur une immense zone d'exercice située au nord de la Suède, de la Finlande et de la Norvège (régions septentrionales). Cette zone a l'avantage d'être peu habitée et peu survolée par des avions de ligne, ce qui limite les nuisances sonores et les risques avec les avions civils.
Ces zones d'opération permettent d'ailleurs l'utilisation de systèmes pour brouiller les signaux GPS, l'utilisation de contre-mesures comme les leurres infrarouges et d'effectuer des vols à très basse altitude ou en supersonique. Sur ces terrains d'entraînement, vastes de plusieurs centaines de kilomètres, des unités de défense aérienne norvégiennes, allemandes et américaines sont déployées au sol afin de complexifier les missions. Enfin, sur les mers, des bâtiments de combat participent aussi aux missions.
Pour comprendre la difficulté d'organiser et de coordonner un exercice international de l'ampleur qu'est Arctic Challenge Exercise 2019, il faut avoir à l'esprit que cet exercice représente à lui seul deux missions quotidiennes pendant quatre jours sur une semaine, à partir de quatre bases aériennes, depuis trois pays différents et pendant deux semaines.
© EC 2/4 « La Fayette » - Explications données par l'escadron depuis son Facebook : « Les paysages désolés du centre de la Scandinavie, à cheval sur la frontière entre la Norvège et la Suède, défilent sous les ailes d'un Rafale de l'EC 1/4 Gascogne et du RC 2/30. Nous rentrons d'une grosse COMAO comme nous en réserve quotidiennement Arctic Challenge et nous étions Blue OCA (Offensive Counter Air). Cette photo est un résumé de notre rythme journalier : d'intenses moments de préparation, des missions complexes et grisantes, de magnifiques paysages ».
© RC 2/30 - Explications données par l'Escadron depuis son Facebook : « Notre exercice en Norvège se poursuit. Pour l'essentiel, il s'agit de COMAO (Combined Air Operations) qui englobent divers avions de tous types (chasseurs, tanker, awacs, etc.), généralement sur d'amples et confortables zones. Sur la photo, nous participions à une mission de Defensive Counter Air (DCA). L'objectif est de protéger une zone donnée par l'organisation d'une patrouille armée ou la défense d'un point précis. Dans le cas présent, nous étions appairés avec deux Rafale B de l'Escadron de Chasse 1/4 "Gascogne" et, afin d'arriver sur le secteur avec un maximum de playtime, nous avions prévu un pré-ravito. Notre station volante du jour était un MRTT britannique du No. 10 Squadron ».